LA POURSUITE IMPITOYABLE
d'Arthur Penn
Etats Unis
1966
aka The chase
avec Marlon Brando, Jane Fonda, Robert
Redford, Robert Duvall, Angie Dickinson
Polar sombre
133 minutes
Synopsis :
Une petite ville du sud des Etats Unis dans
les années 60...
Bubber Reeves, un prisonnier notoire dans la
bourgade parvient à s'évader avec un de ses acolytes de cellule...
Lors de leur échappée, ils blessent
mortellement un automobiliste et Bubber se fait trahir par le forçat qui était
en cavale avec lui...
Il se retrouve seul et affamé...
Le shérif en charge de faire régner l'ordre, Calder,
a été pistonné par un richissime magnat du pétrole qui contrôle tout, Val
Rogers...
Pour son anniversaire en grande pompe, Rogers
donne une cérémonie dans son ranch avec son fils, Jake, où sont conviés la
presque totalité des habitants sauf Edwin Stewart et sa femme Emily, persona
non grata...
Reeves, par l'intermédiaire d'un garagiste,
retrouve sa femme, Anna, qui doit épouser Jake...
La rumeur se répand comme une traînée de
poudre et tous les administrés de la ville, lourdement armés et alcoolisés
veulent retrouver Reeves pour le tuer et appliquer la justice de façon
arbitraire...
Ruby Calder, la femme du shérif, assiste
impuissante au tabassage de ce dernier !
Une longue traque nocturne commence...
Mon avis :
Peinture au vitriol d'une Amérique décadente
où whisky et argent coulent à flots, "La poursuite impitoyable" est
un modèle de mise en scène avec des personnages dévoilés à contre-emploi
(Brando n'est pas indestructible malgré sa carrure monolithique, les femmes
sont des dépravées hystériques sauf Jane Fonda, qui tire son épingle du jeu
brillamment, Redford est un forçat en cavale désabusé et Robert Duvall semble
subir une frustration immense dans sa vie de couple)...
Techniquement, les plans se succèdent
habilement et Arthur Penn nous gratifie de couchers de soleil magnifiques mais
sait, mieux que quiconque, exploiter la nuit, nuit d'où vient le danger et qui
efface toute limitation, où tout devient permis pour les "chasseurs",
littéralement galvanisés par l'alcool, comme exempts de l'autorité du shérif,
et voulant faire appliquer eux mêmes la "punition divine" (il y a
également une critique sévère de la religion dans le film)...
Empreinte d'un racisme latent, cette
"Amérique profonde" devient progressivement folle et ne discerne plus
de limites, avec le levier éthylique et l'effet de masse, faisant ainsi boule
de neige malgré l'autorité (représentée par le shérif Calder) qui s'avèrera
bafouée et souillée...
Comme un rouleau compresseur de démence que
nul ne peut stopper, la "justice" s'appliquera jusqu'à un final
apocalyptique d'une violence rarement vue dans le panorama du cinéma américain
des années 60...
Arthur Penn met en exergue la lâcheté des
hommes lors de la séquence incroyable où le shérif dévale les escaliers, la
chemise et le visage couverts de sang, personne ne lui vient en aide, personne
ne fait le moindre geste mais chacun reste figé sans donner mot !
Imparable et sans compromis, "La
poursuite impitoyable" est non seulement une oeuvre grandiose appuyée par
des comédiens hors pair mais également une vision effrayante d'une société
devenue victime de ses excès et cherchant à se donner raison alors qu'elle va
droit dans le mur...
Véritable film "à part" et
indélébile après visionnage, "La poursuite impitoyable" est, outre un
immense mo(nu)ment de cinéma, le témoignage d'une Amérique incarnée par ses
excès et ses outrances, où Arthur Penn ne ménage personne, que ce soit ses
personnages ou le spectateur qui assiste, médusé, à un métrage hors du commun
et sidérant par sa manière d'oser montrer les choses, si crûment et de façon si
réaliste...
Note : 10/10
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