L'ESQUIVE
d'Abdellatif Kechiche
France
2003
avec Osman Elkharraz, Sara Forestier, Sabrina
Ouazani, Carole Franck, Meryem Serbah, Hafet Ben Ahmed
Love story urbaine
119 minutes
Synopsis :
Quartier des Francs Moisins, Saint Denis,
années 2000...
Abdelkrim, dit Krimo, vit dans cette banlieue
défavorisée avec sa mère, son père étant incarcéré...
Il tombe éperdument amoureux d'une jeune
fille au physique ravageur prénommée Lydia, mais par sa maladresse a beaucoup
de mal à concrétiser ce passage à l'acte...
Lydia prépare une prestation théâtrale de la
pièce de Marivaux "Le jeu de l'amour et du hasard", pour se faire
remarquer d'elle et "s'incruster", Krimo parvient à prendre le rôle
d'Arlequin et ainsi à devenir le partenaire de la belle...
Magalie, l'ex copine de Krimo, va faire une
esclandre auprès de Lydia et de ses amies...
Pris entre deux feux, Krimo perd rapidement
ses repères et Fathi, un autre jeune, son meilleur ami, veut désamorcer et
"régler" cette embrouillamini...
Il donne rendez vous à Lydia et ses deux
copines pour une confrontation manu militari...
Une patrouille de police passe à ce moment là
!
Mon avis :
Témoignage sincère et pas du tout décalé,
"L'esquive" a le mérite d'offrir au spectateur un "parler
vrai" qui fluidifie grandement l'histoire et qui sert de levier à la
crédibilité de cette dernière...
Certes, parfois les dialogues sont
incompréhensibles car les jeunes comédiens (tous non professionnels)
"bouffent" leurs mots et dès lors le phrasé parait inaudible pour les
moins aguerris des habitudes de la sémantique des banlieues, mais il se dégage
une amplitude, un côté touchant qui fait qu'irrémédiablement l'accroche devient
authentique, et il ne pouvait en être autrement qu'avec ce choix établi dès
lors par Kechiche...
Survolté, tonique, vivace,
"L'esquive" se suit comme avec ce qu'il revendique : un marivaudage
moderne, une leçon de vie à l'approche réaliste et crédible...
Tous épatants, les acteurs ont un rôle bien
précis et adapté au déroulement crescendo de ce métrage humainement mené par un
Kechiche au firmament de son style...
La professeur de français rappellerait
presque le Keating du "Cercle des poètes disparus", elle essaie de
donner une impulsion à Krimo, de le faire sortir de sa "bulle" lors
d'un passage d'anthologie, qui ravive toutes les espérances par le biais
d'exutoires salvateurs...
Le personnage de Lydia (magnifique Sara
Forestier) peut symboliser l'amour inaccessible pour un Krimo bridé et bloqué,
gravitant dans un océan de préjugés et un maelström d'impuissance à s'affirmer,
malgré le soutien de Fathi, qui finira par le desservir après la séquence avec
les policiers...
Dans l'ensemble, "L'esquive" outre
ses qualités narratives indéniables emprunte au cinéma populaire des codes
qu'il détournent habilement avec un sens de la technique (comme toujours avec
Kechiche, énormément de gros plans sur les visages) amplifiant les propos tenus
par les protagonistes...
Love story urbaine, leçon de vie,
"L'esquive" est une oeuvre majeure du cinéma français de ces dix
dernières années à découvrir absolument, je ne saurais que trop vous le
recommander...
Note : 10/10
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