LE
TRAITRE
de Marco
Bellocchio
2019
Italie
avec
Pierfrancesco Favino, Maria Fernanda Candido, Luigi Lo Cascio, Fabrizio
Ferracane, Pier Giorgio Bellocchio
Chronique
criminelle
145
minutes
aka Il
Traditore
Produit
par Arte
Synopsis :
Italie,
Sicile, Brésil, Etats-Unis, entre le début des années soixante-dix et le début
des années deux mille…
Le
film retrace le parcours de Tommaso Buscetta, le parrain de la mafia sicilienne…
Son
fils est toxicomane et fait une crise lors d’une fête organisée dans la
luxueuse propriété de Buscetta ; de nombreux autres mafiosi veulent la
peau de Tommaso et sont jaloux de son emprise sur le cartel de la drogue ;
ainsi de nombreuses fusillades ont lieu et les proches de Buscetta dont sa
femme, Maria Cristina de Almeida, sont en danger permanent ; les tueurs ne
font aucune distinction et tuent femmes comme enfants…
Sentant
que le danger devient trop grave et imminent pour sa vie, Buscetta s’exile au
Brésil sous une fausse identité…
Mais
il est rattrapé par son passé et se fait arrêter par les autorités locales !
Le
célèbre juge Giovanni Falcone veut faire parler à tout prix Buscetta et invente
de multiples stratagèmes pour le contraindre ; il menace de jeter son
épouse d’un hélicoptère ; finalement, Buscetta, extradé vers l’Italie,
balance tout au juge Falcone ; les noms de tous les membres de la pègre,
les endroits où ils se trouvent, les trafics qu’ils coordonnent…
C’est
alors qu’un gigantesque procès a lieu en présence de tous les membres de la
Cosa Nostra…
De
lourdes peines sont alors prononcées, y compris pour Tommaso !
Un
terrible attentat contre Giovanni Falcone a lieu, il y perdra la vie…
Buscetta
exilé aux Etats-Unis avec sa femme se sent traqué et à l’abri nulle part…
Lors
d’une sortie au restaurant il décide de quitter l’endroit dans la seconde, il
pense être menacé !
Un
de ses rivaux et ennemis qui se protégeait en permanence avec un bébé lors des
fusillades sera finalement abattu par Buscetta, il aura attendu une vingtaine d’années
pour accomplir et assouvir sa vengeance !
Mon
avis :
Présenté
au festival de Cannes 2019 et n’ayant obtenu qu’un accueil des critiques et du
public très favorable sans glaner de prix (il en gagnera tout de même à d’autres
festivals), « Le traitre » est un film fleuve, un peu une version
italienne et latine des « Affranchis » de Scorsese avec des
similitudes dans l’histoire (la « balance » qui fait tomber tout le
réseau des mafieux par ses témoignages)…
La
mise en scène de Bellocchio est nette et sans fioritures, il n’hésite pas à nous
gratifier de passages très violents mais le réalisme de ces derniers sert à
rendre crédible son histoire, les comédiens sont fabuleux, Favino en Buscetta
témoigne d’un jeu d’acteur imparable ;
mi film d’auteur mi biopic d’un parrain, « Le traitre », c’est du
grand cinéma, sans pétarades et qui ne prend pas le spectateur cinéphile pour
un imbécile (contrairement à ses homologues américains qui privilégient trop l’action
au détriment de l’aspect dramatique), ici c’est co-produit par Arte, on n’est
pas dans un film avec Dwayne Johnson ou Stallone, il y a une réelle recherche cinématographique, un
peu comme faisait Coppola avec sa trilogie des « Parrains » ; et
pourtant, on ne s’ennuie pas, les deux heures vingt- cinq du « Traitre »
passent avec le plus grand plaisir, la mise en scène flamboyante éblouit dès le
début du film avec la cérémonie et le côté dramatique démarre en même temps (le
fils toxicomane pris d’une crise de démence), Buscetta c’est le « parrain »,
le « boss » et il y a l’aspect sacré de la famille qui est mis en
exergue par Marco Bellocchio, lorsqu’on touche à un membre de la famille
Buscetta, c’est net, la réplique ne se fait pas attendre…
Une
scène incroyable, celle des hélicoptères, c’est à se demander si elle n’a pas
été réalisée sans trucages tant elle est réaliste !
L’exil
au Brésil et finalement les aveux au juge Giovanni Falcone, l’enchainement
scénaristique coule de source et il ne pouvait sans doute en être autrement vue
la tournure que prenait les événements…
Et
puis on arrive au nerf central du film (quasiment un tiers de la totalité) où « Le
traitre » se mute en film de procès ; rien n’est épargné au
spectateur, beaucoup de logorrhées (le film est en italien, pas de VF) mais des
séquences démentielles (une crise d’épilepsie, des gangsters qui pètent les
plombs) et toujours un Pierfranceso Favino impérial dans son rôle et que rien
ni personne ne semble ébranler !
L’attentat
contre Falcone est filmé d’une façon extraordinaire avec caméra à l’intérieur
de la voiture, je vous laisse savourer ce moment de folie…
Un
esthétisme appuyé et une rigueur totale dans la mise en scène font du « Traitre »
un film à voir et à encourager absolument, ceux qui l’ont raté en salles
pourront se rabattre sur le blu ray lorsqu’il sortira…
Cela
prouve une chose, le cinéma italien récent n’est pas mort et ne se résume pas
qu’à Nanni Moretti, il reste encore quelques vieux briscards qui répondent
présent pour sortir des films de qualité et « Le traitre », outre qu’il
soit excellent, ravive la flamme du vrai cinéma transalpin avec une grâce et un
aplomb qui font bien plaisir à voir !
Les
cinéphiles et les connaisseurs devraient adorer « Le traitre », film
gigantesque et œuvre phare pour le cinéma italien, Marco Bellocchio fait
honneur à ses compatriotes et on sort groggy après le visionnage, une claque de
deux heures et demie et un film qui restera dans les mémoires et qui se
bonifiera avec le temps…
Masterpiece !
Note :
10/10
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire