CONTE DE LA FOLIE ORDINAIRE
de Marco Ferreri
1981
France/Italie
avec Ben Gazzara, Ornella Muti, Tanya Lopert,
Katia Berger, Susan Tyrrell
106 minutes
Chronique de moeurs
d'après le livre de Charles Bukowski
Synopsis :
Los Angeles et sa banlieue proche,début des
années 80...
Charles Serking est un écrivain rongé par
l'alcool, il végète dans des amphithéâtres où il scande des poèmes à qui veut
bien l'entendre, il vit dans un appartement cradingue et son ex femme lui
interdit de boire de l'alcool, ce qui vaut d'énormes conflits voire des
bagarres entre eux deux...
Un jour, pris d'une pulsion, Serking suit une
jeune femme, Vera, prend le bus avec
elle et la retrouve dans son appartement, ils font l'amour de façon animale,
ponctué de rasades de vin...
Au bout du rouleau, Serking va rencontrer
fortuitement une jeune prostituée, Cass, dans un bar qu'il a l'habitude de
fréquenter...
La jeune femme va changer le cours de sa
vie...
Mon avis :
Adaptation cinématographique du roman de
l'écrivain culte Charles Bukowski, "Conte de la folie ordinaire" est
surtout ultra casse gueule à décliner au cinéma, sauf pour Marco Ferreri,
réalisateur de génie et habitué aux films à scandale ("La grande
bouffe", notamment qui provoqua un tollé auprès du public et des
médias)...
Ici, curieusement, pas trop de provocations
mais surtout une finesse dans la forme, transcendée par un Ben Gazzara sidérant
et qui rentre instantanément dans la peau de son personnage, une composition
extrêmement difficile à incarner...
Parfois terrible (l'automutilation de Cass,
les éclairs de violence inhérents au film) mais toujours empreint d'une
profonde humanité, "Conte de la folie ordinaire" doit plus se voir
comme une chronique sociale que comme un poème misérabiliste, c'est ce qui fait
sa force...
L'addiction sexuelle et éthylique de Serking
sert de levier à sa quête de rédemption et le personnage de Cass, à la fois
juvénile et cristallin, semble être son seul rattachement à l'existence ; Des
étreintes passionnées et fougueuses vont les emmener petit à petit vers la
folie, la perte de repères (un peu comme Betty dans "37.2 le matin"
de Beineix qui reprend certaines thématiques du film)...
Les lieux ont leur importance dans
"Conte de la folie ordinaire" avec cette redondance de la plage et de
la mer que l'on retrouve à multiples reprises...
Immense performance aussi bien artistique que
sur le jeu des acteurs, "Conte de la folie ordinaire" a le double
mérite d'émouvoir (un passage est, à ce titre, déchirant et bouleversant) et de
captiver par l'atmosphère qui y règne du début à la fin...
Témoignage iconoclaste loin des conventions
du cinéma italien (aucun rapport avec l'exubérance des autres films transalpins),
Ferreri place sa caméra et la laisse filer, couler au fil de l'eau avec
l'itinéraire de Charles Serking, à noter que Gazzara est présent pratiquement
dans tous les plans du métrage...
Tentative aboutie et réussie d'adapter un
roman polémique sur pellicule, "Conte de la folie ordinaire" est un
très beau film qui se grave dans la rétine...
A découvrir car, de plus, il est assez
rare...
Note : 9/10
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