UN CHIEN ANDALOU
de Luis Bunuel et Salvador Dali
France
1929
16 minutes
avec Pierre Batcheff, Simone Mareuil, Luis
Bunuel, Salvador Dali, Jaime Miravilles
Court métrage onirique
Synopsis :
"Un chien andalou" est une
succession de saynètes issues de rêves faits par ses auteurs, Bunuel et Dali...
Les deux hommes ont retranscrit sur pellicule
leurs propres imaginaires dans un dédale de plans saugrenus et n'ayant aucun
rapport entre eux, mêlant des situations baroques et improbables dans la vie de
tous les jours...
Un homme tranche l'oeil d'une femme avec un
rasoir, une main se retrouve remplie de fourmis, un homme chute à vélo sans
raison apparente, un couple se retrouve pris dans le sable d'une plage, des
ânes aux yeux ensanglantés sont fixés sur des pianos reliés à une corde qu'un
personnage semble tirer pour se rapprocher d'une femme, acculée à un mur...
Il s'agit, avec cette oeuvre, de
"capter" le surréalisme de Dali car les pans du métrage font souvent
et principalement références aux peintures abstraites du maître...
"Un chien andalou" se vit et se
découvre comme une expérience insensée, magique et globalement insolite, loin
des stéréotypes du cinéma traditionnel...
Mon avis :
Bourré de métaphores amplifiées par une mise
en scène virtuose d'une fluidité absolue, "Un chien andalou" fait
référence par le biais d'allégories subliminales à des thématiques visant à
critiquer et dénoncer la bourgeoisie de l'époque (on est en plein dans la crise
financière de 1929) ou la perception qu'ont les gens de la société (la scène
introductive de l'oeil coupé peut renvoyer à la vision déformée puis annihilée
brutalement, notamment avec la lune "souillée" par ces nuages noirs,
comme sortis des enfers)...
Tout comme la main, "outil" de
l'onanisme se retrouve mortifère avec cette invasion inopinée de fourmis, puis
sera coupée et retrouvée au sol en pleine rue, titillée par une très jeune
femme et son bâton, ou encore le papillon avec la tête de mort, pouvant
symboliser la rétrogradation de la vie suite à des événements négatifs ou
anxiogènes...
Ce qu'il y a d'intéressant dans ce film,
c'est que chacun pourra, à sa guise, interpréter comme bon lui semblera cette
ouverture vers l'inconnu, vers les portes de l'imaginaire et du subconscient :
c'est une approche personnelle du cinéma, hors codes et hors conventions que
peu de (pratiquement aucun) metteurs en scène n'a eu l'idée de (re)créer au
cinéma, ce qui en renforce indéniablement l'intérêt et le niveau de performance...
"Un chien andalou" est un condensé
sur un peu plus d'un quart d'heure d'heures entières de "rêves" qui
auraient pu se dérouler sur plusieurs heures, tout y est si dense que le temps
en est presque occulté, floué et sur quinze minutes on peut en dire beaucoup
plus long et fort que sur de longs discours ou diatribes cinématographiques
sans relief, ici Bunuel et Dali ont transgressé les éléments basiques pour
emboîter sur des récits à l'amplitude onirique poussée à maxima, sans la
moindre compassion ni concession de condescendance vis à vis du spectateur, mis
dans une posture inconfortable et le forçant à se "masturber le
cerveau"...
Techniquement parlant, "Un chien
andalou" a révolutionné le septième art et peut se considérer comme
archétype artistique grâce à des prises de vues en hauteur et en oblique en
même temps, sidérantes pour l'époque !
Un court métrage à voir absolument pour se
rendre compte de l'ambition qui peut être donnée à des artistes, proche du
génie et totalement atypique, ce qui en renforce l'attractivité et l'attraction
sur le spectateur...
Visionnaire, décalé : jamais ces deux
adjectifs n'auront trouvé meilleures significations avec "Un chien
andalou"...
Note : 10/10
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