MALPERTUIS
d'Harry Kümel
France/Belgique/Allemagne
1972
avec Orson Welles, Matthieu Carrière, Michel
Bouquet, Sylvie Vartan
110 minutes
Fantastique déjanté
Nomination Palme d'or Cannes 1972
Musique de Georges Delerue
Synopsis :
Yann, un jeune matelot débarque d'un port, il
est guetté par deux mystérieux hommes...
Il doit se rendre chez son oncle, un vieil
homme en fin de vie qui réside dans le domaine de Malpertuis, une gigantesque
habitation où s'entremêlent chambres, escaliers et passages secrets...
A peine arrivé sur les lieux, il rencontre sa
soeur et se rend compte qu'il y a quelque chose d'anormal au sein de
Malpertuis...
Y végètent un taxidermiste, un homme vêtu de
haillons qui est obsédé par la lumière et qui se terre sous l'escalier, et bien
d'autres personnages plus loufoques les uns que les autres !
Ces derniers ont tous pour point commun
qu'ils sont les héritiers de Monsieur Cassave, le fameux oncle de Yann...
Cassave finit par décéder !
La condition sinéquanone pour que ses
héritiers jouissent de la somme colossale qu'il leur lègue est qu'ils demeurent
à vie à Malpertuis !
Ils ne devront sous aucun prétexte quitter
les lieux !
Commence alors pour Yann un long voyage
initiatique, une longue quête vers l'absolu qui sera semée de plusieurs
cadavres...
Et si la névrose s'était emparée de Yann ?
Mon avis :
"Malpertuis" est l'exemple typique
du "film de demeures", le personnage central étant avant tout le
lieu, l'architecture de ce manoir gigantesque qui est à la fois un dédale à
visiter mais également un labyrinthe pour le spectateur, qui se retrouvera vite
"hypnotisé" par la singularité de l'atmosphère du bâtiment et par la
bizarrerie de celles et ceux qui y vivent...
On est quelque peu déboussolés par cette
maestria mais jamais lassés car on a envie de comprendre et de retenir les
tenants et les aboutissants du propos de Kümel, qui parvient à créer une
"empathie atypique" via des situations parfois décousues mais
toujours captivantes...
L'intérêt du film réside dans la galerie de
ces personnages fantômes et Yann semble atteint de schizophrénie hallucinatoire
(l'issue du film sonne juste et justifie à elle seule l'ambiguïté du métrage),
le propos du film est distanciable par rapport à la manière dont il est perçu
par le spectateur, ce qui rajoute du mystère au mystère, de la peur aux
situations glauques qui emportent "Malpertuis" vers les sommets du
genre fantastique...
Véritable direction d'acteurs tous habités
par leurs rôles, Matthieu Carrière, Michel Bouquet et Orson Welles en tête, et
solide mise en scène basée non seulement sur l'atmosphérique mais aussi sur une
dynamique narrative qui ne faiblit à aucun moment, "Malpertuis"
emprunte un style un peu à celui de Mario Bava et certains plans rappellent son
"Opération Peur" (l'obsession des escaliers, les sorties dans le parc
filmées de façon aérienne, les personnages féminins à la fois sensuels et
maléfiques...).
Excessif à certains moments mais à la fois
sans trop de surenchère lors des meurtres (Kümel insiste moins sur le
voyeurisme que sur la suggestion, ce qui est bienvenu si l'on considère
l'ensemble du film), "Malpertuis" est réellement un film à découvrir
et à réhabiliter, ne serait ce que pour l'originalité qu'il véhicule et pour
l'aspect et l'intelligence sans failles qu'il réserve...
Normalement, les fans de fantastique européen
des années 70 devraient y trouver amplement leur compte...
Note : 9/10
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