samedi 16 juillet 2022

La fille qui en savait trop de Mario Bava, 1963

 

LA FILLE QUI EN SAVAIT TROP

de Mario Bava

1963

Italie

avec Leticia Roman, John Saxon, Valentina Cortese, Mario Serandrei, Gianni di Benedettto, Milo Quesada

Thriller/giallo/film policier

92 minutes

Musique de Roberto Nicolosi

Blu ray édité chez Sidonis Calysta

aka La ragazza che sapeva troppo

Synopsis :

L'Américaine Nora Davis arrive à Rome pour passer des vacances.

Mais dès son atterrissage à l'aéroport, les choses prennent une tournure désagréable : son voisin dans l'avion, avec qui elle avait fait connaissance, est arrêté pour trafic de drogue.

Elle rejoint alors sa tante malade où elle va loger durant son séjour.

Celle-ci est soignée par le Dr Marcello Bassi.

La tante de Nora décède le premier soir de sa visite et Nora se rend à pied à l'hôpital voisin pour prévenir le Dr Bassi.

En chemin, elle est agressée et assommée sur l'escalier de la Trinité-des-Monts

(source : Wikipedia)

Mon avis :

Historiquement et authentiquement, « La fille qui en savait trop » est le premier giallo au monde, c’est le premier film qui créée ce genre au cinéma et Bava a inventé tous les codes dans son métrage qui seront repris par la quasi-totalité des réalisateurs italiens, qu’on le veuille ou non c’est un film précurseur qui allait ouvrir de nouvelles portes dans le septième art !

Bava prend le canevas de Hitchcock (le titre se réfère à « l’homme qui en savait trop ») mais il nous met en scène un film à énigmes, à tiroir, comme des poupées russes (une énigme en amène aussitôt une autre et ainsi de suite…)…

La réalisation est très tonique et chargée en densité ; la sublime Leticia Roman, dont c’est quasiment l’unique rôle au cinéma, est ultra charismatique et possède un regard proche de l’hypnotique, le film comporte même des passages effrayants, très vite désamorcés par un ton humoristique, on sent que Bava s’amuse et qu’il fait ce qu’il veut avec ses spectateurs, on peut parler de chef d’œuvre absolu et de pilier pour l’histoire du cinéma italien, à ce stade, aucun autre réalisateur n’avait osé exploser  les conventions et improviser un tel style, qui sera la génèse de dizaines, de centaines de films après, dans la période d’une vingtaine d’années (entre 1963 et 1983, et même bien après !), « La fille qui en savait trop » est une REVOLUTION !

De plus, au niveau qualitatif, « La fille qui en savait trop » est un modèle de thriller et de film policier, une femme assiste à un meurtre et se retrouve imbriquée dans une histoire rocambolesque, un canevas connu au cinéma, mais magnifié par un sens de la mise en scène propre à Bava, à la fois rigoureux, divertissant et insolite…

Comme toujours, les décors ont une place prépondérante chez Bava et « La fille qui en savait trop » ne déroge pas à cette règle ; au niveau architectural, le film est hyper dense avec même un côté « carte postale » (il ne faut pas oublier que Nora Davis est avant tout une touriste et vient des Etats-Unis pour visiter Rome)…

Bava montre déjà qu’il sait y faire pour distiller à doses progressives l’angoisse et l’étonnement, certains plans séquences provoquent l’effroi, ces trouvailles se répercuteront sur d’autres réalisateurs (Dario Argento, surtout, avec « Profondo rosso » qui « pique » certaines idées du film de Bava ; et un hommage certain dans « Ténèbres » tourné vingt ans plus tard, toujours avec John Saxon et se déroulant à Rome, comment ne pas y voir une similitude ?)…

Bava en finira avec le noir et blanc après « La fille qui en savait trop », c’est une œuvre charnière dans sa filmographie, un « passage », une « étape » qui lui permit d’accéder au rang de cinéaste culte, lui ouvrant les portes vers d’autres domaines de créations (tout le monde sait que sa marque de fabrique, c’est le travail des couleurs dans ses films)…

La musique de Roberto Nicolosi est parfaite et permet d’amplifier les scènes, déjà très amples, le charme de Leticia Roman est également à 70 % dans la réussite du film, on regrettera que la belle n’ait pas pu faire carrière, elle possédait un fort potentiel et un charisme exceptionnel…

L’édition blu ray sortie chez Sidonis Calysta est fabuleuse et on a la chance de retrouver Bruno Terrier dans les bonus qui explique très méthodiquement les différences de montages entre la version américaine et la version européenne, ainsi qu’une présentation du film par Olivier Père d’Arte, cette édition est indispensable pour tout cinéphile et a même le montage américain disponible !

En outre, « La fille qui en savait trop » est un métrage à découvrir ou redécouvrir en priorité, ce n’est pas le meilleur film de Bava, mais sans doute, un de ses plus importants car il a élaboré tout ce qui fit un genre par la suite, par des dizaines d’autres metteurs en scène, Bava was the FIRST ! il ne faut jamais oublier ça !

« La fille qui en savait trop » est essentiel pour comprendre la démarche de Bava par rapport à la façon avec laquelle il appréhende le cinéma ; pour les non cinéphiles, c’est un très agréable moment à passer, aucune prétention de la part de Bava, il crée son style mais aussi respecte totalement la volonté de dépaysement que chacun demande lorsqu’il visionne un film…

Must have absolu !

Note : 10/10











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