BAC
NORD
de
Cédric Jimenez
2020
France
avec
Gilles Lellouche, Adèle Exarchopoulos, François Civil, Kenza Fortas, Karim
Leklou
Polar/film
d’action
104
minutes
Présenté
au festival de Cannes hors compétition
Blu
ray édité chez studiocanal
Synopsis :
En 2012 à Marseille, une des régions aux plus hauts taux de criminalité de France, Grégory (« Greg »), Yassine
(« Yass ») et Antoine, sont des agents de la BAC Nord.
La compagne de Yassine, Nora, est enceinte.
Le trio est désillusionné sur l'utilité de son
travail, et se sent peu soutenu par la hiérarchie.
(source : Wikipedia)
Mon
avis :
Dans
la lignée des « Misérables » de Ladj Ly mais avec un côté beaucoup plus
« polar », « BAC Nord » est une grande réussite et les
séquences qui défilent à un rythme épileptique donnent une force énorme au
métrage, Jimenez narre les dérives de flics ripoux qui sévissaient dans les
quartiers nord de Marseille il y a une dizaine d’années, le réalisateur opte
pour le choix du réalisme et décline son propos avec des passages très violents
et très durs, n’omettant pas une direction d’acteurs impeccable où les
protagonistes ont du faire preuve de grandes conditions physiques pour rendre
crédible l’histoire ; Cédric Jimenez maintient une pression maximale, que
ce soit sur les policiers mais aussi sur le spectateur, pris dans un tourbillon
avec un antagonisme flics/voyous inédit par son aspect frontal dans le cinéma
français !
Certaines
séquences sont révoltantes quand on voit l’irrespect total pour la police de la
part des voyous, notamment le gamin qui les insulte de tous les noms d’oiseaux
lors de son interpellation, ce n’est pas étonnant que le film ait été récupéré
par les partis politiques d’extrême droite et qu’il ait déclenché une polémique
monstre à sa sortie…
Mais
finalement, l’illégalité est des deux côtés puisque c’est les policiers, justement,
qui se retrouvent « hors la loi » puisqu’ils rackettent et trafiquent
le cannabis qu’ils subtilisent aux trafiquants, dans le but d’arrondir leurs
fins de mois, au vu d’une paye misérable pour un « travail » où ils
risquent leurs vies et qu’ils n’ont que peu de reconnaissance par rapport à
leur hiérarchie !
Lorsqu’un
immense démantèlement du trafic de drogue se produit, les flics de la Bac sont
félicités, mais revers de la médaille (et ils ne s’en doutaient pas), des
micros avaient été placés dans leurs véhicules par l’IGPN (la police des
polices) et les trois bougres responsables écopent de peines de prison !
C’est
là que le film de Cédric Jimenez prend alors tout son sens et devient carrément
intéressant, il ne « charge » pas uniquement les délinquants dans son
film mais a l’honnêteté de reconnaître et montrer la déliquescence et les abus
des flics ripoux, qui vont regretter amèrement leurs actes, répréhensibles de
surcroit !
Ce
postulat accepté, Jimenez met aussi le paquet sur l’action pure (bien plus
amplifiée que dans « Les misérables » et avec de plus gros moyens !)
et un soin tout particulier a été accordé pour les poursuites en voitures et
les combats dans les cages d’escaliers, ça barde méchamment et le spectateur n’a
jamais le temps de reprendre son souffle, « BAC Nord » est un polar
uppercut très oppressant et le rythme déployé est incessant, avec certains passages
à 200 à l’heure filmés caméra sur l’épaule !
Gilles
Lellouche, mais aussi tous les autres comédiens, s’impliquent comme des dératés
dans leurs rôles, et les pétages de plombs (notamment lors de l’interrogatoire
avec l’IGPN) sont tout à fait justes et crédibles…
Seul
Antoine parviendra à « sortir » de la mouise ses deux autres
collègues en balançant son informatrice et en lui faisant « porter le
chapeau » du trafic alors qu’il lui avait juré de garder le silence et de
taire sa complicité !
Devant
la folie mentale qui guette Grégory, qui ne supporte pas l’incarcération,
Antoine « sauvera les meubles » mais ce sera très dur et la réhabilitation
des trois flics ripoux se fera dans la douleur, exclus de la police et devant
retrouver un travail pour survivre…
Adèle
Exarchopolous, excellente actrice, devra trouver le courage pour élever son
fils alors que Yassine, son mari lui aussi policier, finira par recouvrer la
liberté ; à ce titre, le moment de la fouille de la maison de Nora est poignant
et Adèle Exarchopoulos donne une composition viscérale où elle joue avec ses
tripes !
« BAC
Nord » est donc un excellent film, rentre-dedans et énergique, qui traite
d’un sujet qui s’est réellement produit, sans exagérations ni grandiloquences,
mais avec un propos sincère et loyal de la part de Cédric Jimenez, qui n’oublie
pas de rendre son métrage attractif et intéressant pendant une heure quarante…
C’est
un film qui comblera les cinéphiles fans de polars français burnés mais aussi
les jeunes qui pourront y identifier leur quotidien car Jimenez évite de
prendre trop de distances avec la réalité et nous impose un ton brut de décoffrage,
certes déconcertant, mais nécessaire pour la crédibilité de son film…
Globalement,
« BAC Nord » est à marquer d’une pierre blanche, pas trop de films
ont abordé le sujet de la délinquance dans les banlieues difficiles, rarement un
réalisateur a donné un aspect aussi jusqu’au-boutiste, peut être Ladj Ly avec « Les
misérables » ou Jean François Richet avec « Ma 6-t va crack-er »
en 1996, en tout cas « BAC Nord » est à visionner absolument !
Une
bombe bourrée d’énergie !
Note :
9/10