samedi 29 janvier 2022

BAC Nord de Cédric Jimenez, 2020

 

BAC NORD

de Cédric Jimenez

2020

France

avec Gilles Lellouche, Adèle Exarchopoulos, François Civil, Kenza Fortas, Karim Leklou

Polar/film d’action

104 minutes

Présenté au festival de Cannes hors compétition

Blu ray édité chez studiocanal

Synopsis :

En 2012 à Marseille, une des régions aux plus hauts taux de criminalité de France, Grégory (« Greg »), Yassine (« Yass ») et Antoine, sont des agents de la BAC Nord.

La compagne de Yassine, Nora, est enceinte.

Le trio est désillusionné sur l'utilité de son travail, et se sent peu soutenu par la hiérarchie.

(source : Wikipedia)

Mon avis :

Dans la lignée des « Misérables » de Ladj Ly mais avec un côté beaucoup plus « polar », « BAC Nord » est une grande réussite et les séquences qui défilent à un rythme épileptique donnent une force énorme au métrage, Jimenez narre les dérives de flics ripoux qui sévissaient dans les quartiers nord de Marseille il y a une dizaine d’années, le réalisateur opte pour le choix du réalisme et décline son propos avec des passages très violents et très durs, n’omettant pas une direction d’acteurs impeccable où les protagonistes ont du faire preuve de grandes conditions physiques pour rendre crédible l’histoire ; Cédric Jimenez maintient une pression maximale, que ce soit sur les policiers mais aussi sur le spectateur, pris dans un tourbillon avec un antagonisme flics/voyous inédit par son aspect frontal dans le cinéma français !

Certaines séquences sont révoltantes quand on voit l’irrespect total pour la police de la part des voyous, notamment le gamin qui les insulte de tous les noms d’oiseaux lors de son interpellation, ce n’est pas étonnant que le film ait été récupéré par les partis politiques d’extrême droite et qu’il ait déclenché une polémique monstre à sa sortie…

Mais finalement, l’illégalité est des deux côtés puisque c’est les policiers, justement, qui se retrouvent « hors la loi » puisqu’ils rackettent et trafiquent le cannabis qu’ils subtilisent aux trafiquants, dans le but d’arrondir leurs fins de mois, au vu d’une paye misérable pour un « travail » où ils risquent leurs vies et qu’ils n’ont que peu de reconnaissance par rapport à leur hiérarchie !

Lorsqu’un immense démantèlement du trafic de drogue se produit, les flics de la Bac sont félicités, mais revers de la médaille (et ils ne s’en doutaient pas), des micros avaient été placés dans leurs véhicules par l’IGPN (la police des polices) et les trois bougres responsables écopent de peines de prison !

C’est là que le film de Cédric Jimenez prend alors tout son sens et devient carrément intéressant, il ne « charge » pas uniquement les délinquants dans son film mais a l’honnêteté de reconnaître et montrer la déliquescence et les abus des flics ripoux, qui vont regretter amèrement leurs actes, répréhensibles de surcroit !

Ce postulat accepté, Jimenez met aussi le paquet sur l’action pure (bien plus amplifiée que dans « Les misérables » et avec de plus gros moyens !) et un soin tout particulier a été accordé pour les poursuites en voitures et les combats dans les cages d’escaliers, ça barde méchamment et le spectateur n’a jamais le temps de reprendre son souffle, « BAC Nord » est un polar uppercut très oppressant et le rythme déployé est incessant, avec certains passages à 200 à l’heure filmés caméra sur l’épaule !

Gilles Lellouche, mais aussi tous les autres comédiens, s’impliquent comme des dératés dans leurs rôles, et les pétages de plombs (notamment lors de l’interrogatoire avec l’IGPN) sont tout à fait justes et crédibles…

Seul Antoine parviendra à « sortir » de la mouise ses deux autres collègues en balançant son informatrice et en lui faisant « porter le chapeau » du trafic alors qu’il lui avait juré de garder le silence et de taire sa complicité !

Devant la folie mentale qui guette Grégory, qui ne supporte pas l’incarcération, Antoine « sauvera les meubles » mais ce sera très dur et la réhabilitation des trois flics ripoux se fera dans la douleur, exclus de la police et devant retrouver un travail pour survivre…

Adèle Exarchopolous, excellente actrice, devra trouver le courage pour élever son fils alors que Yassine, son mari lui aussi policier, finira par recouvrer la liberté ; à ce titre, le moment de la fouille de la maison de Nora est poignant et Adèle Exarchopoulos donne une composition viscérale où elle joue avec ses tripes !

« BAC Nord » est donc un excellent film, rentre-dedans et énergique, qui traite d’un sujet qui s’est réellement produit, sans exagérations ni grandiloquences, mais avec un propos sincère et loyal de la part de Cédric Jimenez, qui n’oublie pas de rendre son métrage attractif et intéressant pendant une heure quarante…

C’est un film qui comblera les cinéphiles fans de polars français burnés mais aussi les jeunes qui pourront y identifier leur quotidien car Jimenez évite de prendre trop de distances avec la réalité et nous impose un ton brut de décoffrage, certes déconcertant, mais nécessaire pour la crédibilité de son film…

Globalement, « BAC Nord » est à marquer d’une pierre blanche, pas trop de films ont abordé le sujet de la délinquance dans les banlieues difficiles, rarement un réalisateur a donné un aspect aussi jusqu’au-boutiste, peut être Ladj Ly avec « Les misérables » ou Jean François Richet avec « Ma 6-t va crack-er » en 1996, en tout cas « BAC Nord » est à visionner absolument !

Une bombe bourrée d’énergie !

Note : 9/10









Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire