KIDS RETURN
de Takeshi Kitano
1996
Japon
avec
Masanobu Ando, Ken Kaneko, Susumu Terajima, Ryo Ishibashi, Leo Morimoto
Chronique
de moeurs
107
minutes
Sorti
en DVD chez studiocanal
Synopsis :
Une
petite ville de l’archipel japonais, milieu des années quatre- vingt dix…
Masaru
et Shinji sont deux étudiants qui font souvent l’école buissonnière, ils
sèchent les cours et ridiculisent leurs enseignants lors de pitreries
orchestrées avec habileté (une marionnette géante hissée du toit du collège
leur vaudra un renvoi immédiat !)…
Leur
vie semble sans le moindre avenir, multipliant les larcins ou allant jusqu’à
racketter leurs camarades…
Les
deux jeunes garçons s’inscrivent dans un club de boxe et Shinji y trouve de
réelles prédispositions, contrairement à Masaru qui refuse de se plier aux
réglementations inhérentes au sport (ni boire d’alcool ni fumer)…
Dans
un restaurant, Masaru se lie d’amitié avec des yakusas locaux qui le prennent
sous leur houlette…
Refoulés
à l’entrée d’un cinéma de quartier, Masaru et Shinji se déguisent en adultes et
finissent par y rentrer, leur quotidien est ponctué par le sport, les bêtises
et l’argent facile sans travail…
Ils
végètent sans le moindre but, prenant les jours qui viennent de façon
insouciante et calculée en même temps…
Mon
avis :
« Kids
return » est un film à part dans la filmographie de Takeshi Kitano, loin
des violences ou des histoires de gangsters qui firent son style, il s’agit ici
d’une chronique sociale, une histoire sobre mais pas simpliste, avec pour
schéma le désarroi de la jeunesse japonaise, livrée à elle-même et à l’avenir
peu reluisant…
Le
duo Masaru/Shinji devient attachant et le spectateur suit leur parcours avec
facilité, la mise en scène de Kitano restant fluide malgré quelques plans
répétitifs (la cour de l’école, la salle de classe, l’entrée du cinéma) et le
montage très tonique retient l’attention…
Le
levier de la boxe est mis en avant mais ce n’est pas le principal intérêt pour
les deux jeunes gens, qui ne semblent pas trop souffrir, prenant les choses
avec résignation malgré une paupérisation
omniprésente…
Désoeuvrés,
les protagonistes sont imbriqués dans des histoires émouvantes et exotiques
pour un cinéma intelligent et exigeant, Kitano sait parfaitement retranscrire
les émotions qu’il veut montrer, appuyé par une viscéralité peu commune et que
l’on ne retrouve que dans le cinéma asiatique, il en est le fer de lance…
Ponctué
de foudroiements (les passages à tabac lors des rackets, les matchs de boxe, l’influence
néfaste des yakusas, l’incompréhension des équations lors des cours de
mathématiques), « Kids return » est le témoignage d’une jeunesse qui
gravite entre l’éducation obligatoire et la tentation d’une liberté permanente
mais liée à l’autonomie par l’argent, très dure à obtenir…
Avec
un immense talent et un sens réel de l’humanisme, Kitano nous conte une belle
histoire, pleine de charme et emplie du plus grand réalisme…
Sincère
dans son approche, « Kids return » offre une perspective au cinéma
asiatique de revigorer le teen movie, loin des codes d’outre Atlantique vues
précédemment (les films de John Hughes), ici on est à cent lieues de « Breakfast
club » ou de la « Guerre des boutons », la déclinaison se fait
en rapport avec les codes sociétaux, c’est ce qui fait sa singularité…
Laissant
son empreinte avec une manière fine et percutante, « Kids return »
est un film à voir, frère cadet de « Violent cop » et se rapprochant
plus de « Hana bi », il prouve que Kitano sait faire de beaux
métrages et qu’il déploie toute son humanité dans ses œuvres, ce qui est tout à
son honneur…
Note :
8/10