vendredi 17 mai 2019

Amour et mort dans le jardin des dieux de Sauro Scavolini, 1972


AMOUR ET MORT DANS LE JARDIN DES DIEUX
de Sauro Scavolini
1972
Italie
avec Erika Blanc, Ezio Marano, Peter Lee Lawrence, Orchidea de Santis, Rosario Borelli, Carla Mancini
Drame expérimental/Giallo atypique
89 minutes
Blu ray édité chez Le Chat qui fume
Photographie de Romano Scavolini
aka Amore et morte nel giardino degli dei
Synopsis :
Ville de Spoleto, Italie, début des années soixante-dix…
Une femme nommée Azzura vit dans une luxueuse villa à côté d’un parc, non loin d’une forêt, elle est dépressive et pratique des séances de psychanalyse où son psychiatre enregistre les diverses discussions lors des séances et entretiens avec elle…
Azzura fait une supposée tentative de suicide, on la retrouve totalement nue dans sa baignoire, avec ses poignets ouverts…
Martin, un vieil homme qui sillonne la région, est ornithologue ; il prend des cris d’oiseaux dans un parc et les enregistre sur un microphone afin de les étudier…
Un jour, Martin, découvre au fond d’un buisson, des bandes magnétiques abimées et chiffonnées ; curieux, il décide de restaurer les bandes et après il les écoute !
Le film revient par flashbacks et nous fait découvrir Manfredi, le frère d’Azzura ; cet homme est colérique et entretient une relation quasi incestueuse avec sa sœur, il est également très jaloux et veut contrôler les relations masculines qui gravitent autour d’Azzura (c’est une très belle femme et elle ne laisse pas insensible les hommes)…
Un pianiste, Timothy, devient l’époux d’Azzura, ce qui met en rage Manfredi…
Une autre femme, superbe elle aussi, nommée Viola se rend de nombreuses fois au domicile d’Azzura…
Martin, l’ornithologue, va découvrir la vérité sur la supposée tentative de suicide d’Azzura, qui n’en est pas une, mais bel et bien un acte de folie d’une tierce personne sur la jeune femme !
Manfredi, atteint d’une névrose, donne une méga engueulade à Azzura, puis il la suit…
Une hécatombe a alors lieu et Manfredi, pensant tout contrôler et maquiller ses meurtres pour éviter d’être appréhendé par la police, se rend dans le parc de la villa d’Azzura…
Alors qu’il croit parfaire ses meurtres, sa jambe se prend dans un piège à loups et l’immobilise, fou de douleur et sans personne pour venir à son secours !
Mon avis :
Unique film de Sauro Scavolini, le frère de Romano Scavolini, réalisateur de « Cauchemars à Daytona Beach » et « Exorcisme tragique » et sommité en tant que chef de la photographie sur ses films, « Amour et mort dans le jardin des dieux » (quel titre sublime !) peut s’apparenter au style du giallo, mais de façon très atypique (un peu comme pour « L’œil du labyrinthe » de Caiano, tourné la même année), ici pas de tueur ganté comme pour les codifications inhérentes au giallo, mais une histoire tortueuse, assez difficile à comprendre au début et où le spectateur s’immerge dans des décors de toute beauté (une recherche graphique indéniable sublime le film, de plus la qualité du Blu ray du « Chat qui fume » est au summum et c’est un régal de suivre le film !)…
Aux deux tiers du film, lorsqu’on comprend la vraie personnalité de Manfredi, là ça devient super intéressant et la bifurcation scénaristique entamée par Scavolini rend le film passionnant, il faut donc s’armer de patience et suivre le film jusqu’à son issue, parce que cela vaut vraiment le coup de s’y attarder…
La belle Erika Blanc, égérie du film gothique italien (vue notamment dans le « Opération peur » de Mario Bava) porte l’histoire sur ses épaules et avec le personnage de Manfredi, ce sont eux deux les clefs de voûte de l’intrigue…
« Amour et mort dans le jardin des dieux » est un giallo/thriller élitiste et très insolite qui pourra en déconcerter plus d’un, y compris les cinéphiles aguerris aux gialli, mais la qualité du scénario, la direction sans faille des acteurs et surtout ces décors superbes parviennent aisément à susciter et confirmer l’intérêt pour ce film, qu’on peut qualifier « d’auteur » et qui rajoute une pierre à l’édifice du genre, par sa disparité et son culot (pas mal d’érotisme dans le film, mais dans le sens artistique et non graveleux)…
C’est même un ancêtre du « found footage » avec des bandes de cassettes audio à la place de bandes vidéos, ce qui est un procédé habile maintes fois utilisé mais qui redonne énormément de suspense et tient le spectateur en haleine jusqu’au final particulièrement électrisant…
Sauro Scavolini a eu l’excellente idée d’avoir choisi de ne rien faire comme ses prédécesseurs et il remporte l’adhésion par son originalité et la qualité du travail rendu, on ne peut donc que se féliciter du talent qu’il a déployé et, en étant patient et en allant au terme du film, on peut dire que c’est une grande réussite !
Surtout que le film est totalement inédit et inconnu en France, et que le boulot de l’éditeur « Le chat qui fume » est phénoménal avec un packaging superbe et deux bonus d’interviews des actrices principales ; l’image est fabuleuse et d’une netteté qui fait honneur au film et au travail de Romano Scavolini pour la photo…
Pour les cinéphiles friands de curiosités et ouverts aux films insolites, « Amour et mort dans le jardin des dieux » s’impose comme un must have et une évidence à le posséder…
C’est aussi l’occasion et la preuve que le cinéma italien de l’époque regorgeait de chefs d’œuvres méconnus et pas toujours distribués dans les autres pays d’Europe qui gagnaient à être réhabilités, quasiment cinquante ans plus tard, ressortir un tel film en blu ray tient du miracle et « Le chat qui fume » fait ainsi preuve d’une audace peu commune !
Un film qui n’a pas trop vieilli et qu’on peut saluer comme « élite » du giallo, je vous le recommande chaudement et c’est une initiative de la part du « Chat qui fume » qu’il faut lourdement encourager…
Note : 9/10








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