MIA
MADRE
de
Nanni Moretti
2015
Italie
avec Nanni Moretti, John
Turturro, Margherita Buy, Giulia Lazzarini, Stefano Abbati, Beatrice Mancini
Drame
intimiste
107
minutes
DVD
édité chez Arte vidéo
Synopsis :
Italie,
années deux mille quinze…
Giovanni
et Margherita sont frères et sœurs ; Margherita est réalisatrice de films
et doit diriger l’acteur américain Barry Huggins, qui s’avère très brouillon et
qui n’apprend jamais son texte, ce qui vaudra à Margherita des pétages de
plombs et un stress chronique…
Ada,
la mère de Giovanni et Margherita, est une dame âgée, ancienne professeur de
latin ; la pauvre femme est atteinte d’une maladie au cœur due à sa
vieillesse…
Vittorio,
le compagnon de Margherita, finit par se faire larguer…
Livia,
la fille de Margherita, une adolescente, a de mauvais résultats scolaires,
notamment en latin, elle souhaite que sa mère lui achète un scooter pour ses
déplacements…
Un
jour, à l’hôpital, la toubib met les pieds dans le plat et annonce à Giovanni
et Margherita que leur mère n’en a plus pour très longtemps à vivre : il
ne lui reste que quelques jours à vivre, la maladie ayant progressé de façon
fulgurante !
En
parallèle de leurs activités, Giovanni et Margherita se préparent la mort
imminente de leur mère…
Mon
avis :
« Mia
madre » est un film très touchant filmé de manière vraiment simple et son
accès est très facile au spectateur car il n’y a aucune prétention ni aucun
blocage culturel, Nanni Moretti fait preuve d’une très grande pudeur dans le
sujet qu’il aborde, qui aurait pu virer dans le scabreux : la descente
vers la mort d’une dame âgée…
Le
film est bouleversant mais il n’y a aucun voyeurisme, « Mia madre »
se suit de manière fluide et linéaire, les personnages gravitent autour de la vieille
dame, d’abord hospitalisée, et semblent neutres dans le déroulement de
l’histoire, aucun éclat ni de fulgurances ou de violences mais un film simple,
beau, humain, posé et d’un calme empreint de plénitude…
La
dimension humaniste fait partie intégrante de « Mia Madre », Morettti
agrémente son métrage d’éléments comiques avec le personnage de Turturro qui
joue un acteur de cinéma qui oublie en permanence son texte, ce qui donne lieu
à des scènes cocasses…
Moretti
se débrouille pour que l’on ne ressente pas la douleur de la vieille dame, il
met un point d’honneur dans la pudeur (lorsqu’est annoncé le décès, la petite
fille tourne la tête vers le mur, ainsi nous ne la voyons pas pleurer,
trouvaille géniale !)…
« Mia
madre » est un film trigénérationnel où s’entrechoquent trois femmes
issues de la même filiation et qui semblent soudées plus que jamais dans
l’adversité et la fraternité, le propos premier de Moretti pourrait être la
famille mais il rajoute des éléments comme le doute, la perte de confiance en
soi ; la thématique de la mort se retrouve à l’identique que dans
« La chambre du fils », un autre de ses films, mais Moretti parvient
avec la même habileté à transcender cette partie de l’existence de façon
virtuose et extrêmement intelligente, on ne peut que lui tirer notre chapeau…
Poignant
et très beau, « Mia madre » fait partie du patrimoine des films
dramatiques italiens, Moretti trouve une tonalité juste dans sa mise en scène
et son talent n’est plus à prouver, il incarne à lui seul un renouveau du
cinéma d’auteur européen mais n’oublie pas pour autant de garder son film
accessible à tous les publics, c’est cela qui fait la force de « Mia
madre », la fluidité des séquences, l’approche cinématographique de
Moretti sont épurées à l’extrême, il va à l’essentiel des choses et parvient à
rendre convaincante une intrigue où beaucoup d’autres cinéastes se seraient
cassés la gueule…
A
contrario de films comme « Alabama Monroe », nous n’assistons pas
trop à la déchéance physique due à la maladie et Moretti refuse d’appuyer là où
ça fait mal, ceci étant, « Mia madre » est à éviter pour les
personnes sensibles qui auraient perdu un proche d’une grave maladie, cela
risquerait de raviver des souvenirs douloureux à celles-ci…
Le
fait que la femme soit réalisatrice de cinéma permet de désamorcer la gravité
de la situation première du film (la maladie de la mère) et les escapades sur
les tournages apportent un peu de fraicheur au spectateur qui oscille entre
l’hôpital, la demeure familiale et les divers lieux de travail de chacun…
Moretti
n’occulte pas le côté social qui lui est cher puisque le film tourné traite
d’un conflit entre le patronat et des employés qui risquent d’être licenciés…
A
ce titre, le tout début du film est une habile mise en abyme, on y voit que du
feu !
Et
puis il y a ce plan séquence fabuleux de la danse entre une des figurantes et Huggins,
le film se lâche complètement et ça s’apparente à de la jubilation, à de la magie,
le trouble de la mort laisse place à la joie et au bonheur, Nanni Moretti est
un pur génie !
En
définitive, on peut réellement qualifier « Mia madre » de pur chef
d’œuvre, le propos est certes grave mais la révélation opérée par Moretti tend
moins vers le mélodrame/pathos que vers la fable humaniste familiale…
A
voir sans faute !
Note :
9.5/10
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