LE
VENIN DE LA PEUR
de Lucio
Fulci
1971
France/Italie/Espagne
Aka Carole
aka les salopes vont en enfer aka Schizoïd aka Una lucertola con la pelle di
donna aka Woman in a lizzard’s skin
Avec Florinda Bolkan, Anita
Strindberg, Jean Sorel, Stanley Baker, Silvia Monti, Alberto de Mendoza, George
Rigaud
Giallo
onirique
103
minutes
Edité
en blu ray chez Le chat qui fume éditions
Synopsis :
Angleterre,
début des années 70…
Carole
Hammond, fille d’un avocat notoire, a un suivi psychiatrique avec le docteur
Kerr, la femme a des accès de névrose lors de rêves récurrents où elle se voit
avec une autre femme la poignardant, elle restitue le déroulé de ses rêves au
médecin qui tente d’analyser l’impact sur son subconscient…
Sa
voisine, Julia Durer, une actrice, est retrouvée tuée dans son appartement, Hubert
et Jenny, deux hippies toxicomanes, sont
suspectés d’être les coupables…
La
police enquête et une empreinte de doigt retrouvée sur le coupe papier qui a
été utilisé pour le crime s’avère être celle de Carole, celle-ci est
appréhendée…
Libérée
sous caution, Carole est traquée par Hubert qui la suit jusque dans une église
moderne désaffectée, tel un psychopathe, il jure d’avoir sa peau et la
terrorise…
Mon
avis :
Incursion
dans le giallo pour Fulci, « Le venin de la peur » se démarque de ses
homologues par le côté appuyé sur l’onirisme présent surtout dans la première
moitié du film, ce qui permet à Fulci de l’utiliser comme levier pour son
intrigue, renvoyant la pathologie de son actrice principale à la schizophrénie
et brouillant ainsi les multiples pistes de l’enquête…
Cette
fois, tout a été conçu au niveau technique pour en mettre plein la vue et le
résultat est surprenant en tous points !
Zooms,
cadrages, mouvements de caméras, sauts du coq à l’âne, le spectateur est en
perpétuelle ascension visuelle pour un cinéma révolutionnant et explosant les
bases du genre !
« Le
venin de la peur » est à Lucio Fulci ce que « Citizen Kane » est
à Orson Welles, une recherche perpétuelle de création doublée d’une mise en
forme imparable et stylée…
Certains
passages font vraiment peur mais pas cette peur habituelle aux films de genre
de l’époque, une peur fabriquée par l’INSOLITE de situations, par la vision
effrayante de plans séquences obnubilant ou glacials, le tout teinté d’un
érotisme déviant et bizzaroïde qui met plutôt mal à l’aise…
Prouvant
une énième fois son talent et son sens de la recherche cinématographique, Fulci
expérimente à sa sauce des innovations qui feront date, que ce soit dans le
fond ou dans la forme, dirigeant de main de maitre des actrices habitées par
leur rôle et déployant un charisme qui va plus loin que le simple envoûtement,
le résultat est subjuguant !
Aucune
esbroufe, pas de vulgarité mais une finesse et une intelligence dans l’ensemble
avec une histoire passionnante du début à l’issue, maitrisée avec application
par un Fulci qui signe ici son métrage le plus abouti techniquement parlant, il
se surpasse comme dans « La longue nuit de l’exorcisme », « Le
venin de la peur » fait aisément partie du trio de tête de ses trois
meilleurs films…
Fulci
utilise également pas mal de peurs viscérales (l’attaque des chauves-souris, la
vision des chiens décharnés, le duo de toxicos qui ferait peur à une couvée de
singes…) et s’emploie à styliser avec harmonie des séquences majestueuses d’intensité
(le gros plan sur la rétine de Carole, le cœur suintant du sang, l’orgue qui
fait surgir la musique, la porte qui s’enfonce avec des zooms rapides qui
tapent)…
Une œuvre
majeure rendue visible au grand public par une splendide édition DVD/BLURAY
édité chez les éditions « Le chat qui fume », ce film réconciliera
les cinéphiles friands de raretés et les esthètes du cinéma d’auteur…
Immanquable !
Note :
10/10
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