MAIS
NE NOUS DELIVREZ PAS DU MAL
de
Joël Séria
1971
France
aka Don’t deliver us from evil
avec
Jeanne Goupil, Michel Robin, Henry Poirier, Véronique Silver, Bernard Dhéran,
Catherine Wagener
Fantastique
102
minutes
Edité
en DVD chez mondomacabrodvd
Synopsis :
Une
ville de province dans la France profonde du début des années soixante-dix…
Anne
et Lore sont deux adolescentes issues de familles aisées, elles figurent parmi
les pensionnaires d’une maison de bonnes sœurs, elles multiplient les
transgressions face aux conventions du clergé, notamment en recrachant les
hosties lors de la messe ou en faisant les quatre cents coups lors d’échappées
perdues à la limite de l’illicite...
Anne
découvre son corps juvénile et se caresse les seins devant un miroir, Lore allume
un fermier qui manque de la violer, les deux jeunes filles ne se dévouent qu’à
une seule cause, faire et provoquer le mal, elles ne semblent vivre que pour
cela…
Anne
prend un malin plaisir à torturer et tuer des petits oiseaux, Lore et Anne se
découvrent des penchants pyromanes…
Après
avoir mis le feu à une grange, elles tuent un automobiliste en lui fracassant
le crâne alors qu’il tentait d’abuser d’elles…
L’aumônier,
un vieil homme simplet, est tourné en ridicule et manque de se noyer lors d’une
altercation avec les fillettes sur une barque, en pleine nuit…
Bientôt
la police remonte la piste et tout coïncide vers Lore et Anne qui décideront de
se suicider par immolation lors de la fête paroissiale devant une assemblée
médusée !
Mon
avis :
Couvert
par son intelligence de traitement, « Mais ne nous délivrez pas du
mal » aborde un sujet pour le moins discutable, tiré d’un fait divers, et
Séria n’hésite pas à racoler lors de séquences libidineuses à la limite de la
bienséance, c’est pour cela que le film fut banni dans plusieurs pays, eu égard
au fait qu’il ose tout le temps et qu’il s’attaque frontalement à la religion
et au christianisme…
Jeanne
Goupil et Catherine Wagener sont extrêmement douées dans leurs compositions,
elles semblent en roue libre dans une succession de saynètes parfois rudes à
voir (les meurtres des oiseaux, apparemment non truqués ! la ligue de
protection des oiseaux a du hurler !) et
le côté extrêmement sexué des deux ados sert de levier à Séria pour
accentuer la perversité, la perversion et l’aspect transgressif du film, même
si la qualité de la mise en scène sauve
l’ensemble…
Séria
ne se contente pas d’accumuler ses plans mais chacun de ceux-ci sont imbriqués
pour aller crescendo vers la folie douce qui prend les deux jeunes filles,
comme si elles étaient victimes de bouffées délirantes lors de leurs échappées,
sans cesse hilares et coupées de toute réalité…
Dans
« Mais ne nous délivrez pas du mal », les adultes sont mis au second
plan, ils semblent plutôt absents ou peu loquaces, le film est essentiellement
concentré sur Anne et Lore, ce sont elles les héroïnes et l’intérêt pour le
spectateur, leur relation, même si non saphique, va se muter en amitié
amoureuse et viscérale, tout à fait à contrecourant du cinéma du début des années
soixante- dix…
« Mais
ne nous délivrez pas du mal » est donc un film particulièrement culotté
dans son insouciance et sa décomplexité, il convient d’être particulièrement
sur-ouvert pour le visionner, passée cette acceptation, il n’est pas exclu d’y
trouver une certaine fascination et une empathie voire une complaisance dans
cette histoire touchante de deux jeunes ados paumées et désaxées…
Par
son atypisme, « Mais ne nous délivrez pas du mal » surprend ou
révulse, c’est selon, mais on peut difficilement rester insensible face à ce
déploiement d’inventivité de la part de Séria, qui privilégie autant la forme
que le fond et a vraiment du travailler son film en amont, notamment pour le
repérage des actrices…
Considéré
à juste titre comme un film culte,
« Mais ne nous délivrez pas du mal » a le double mérite d’aborder un
sujet rarement exploité au septième art (la transgression de la religion) et
aussi de parfaire le genre fantastique bien trop rare dans l’hexagone…
Initiative
courageuse pour un résultat éblouissant et inoubliable !
Note :
9/10
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