L’ANNEE
DERNIERE A MARIENBAD
d’Alain
Resnais
1961
France
Avec
Delphine Seyrig, Sacha Pitoeff, Giorgio Albertazzi, Françoise Bertin, Luce Garcia
Villle, Françoise Spira, Jean Lanier
Film
expérimental
91
minutes
Edité
en DVD chez studiocanal
Lion
d’or à Venise en 1961
Nommé
aux Oscars pour le meilleur film étranger
Scénario
et dialogues d’Alain Robbe Grillet
Assistant
réalisateur : Volker Schlondorff
Synopsis :
Un
luxueux hôtel de Bavière, nous ne connaissons pas les noms des personnages, l’action
se passe au début des années soixante…
Un
homme est persuadé d’avoir rencontré une femme brune très jolie il y a de cela un
an, à Marienbad…
L’homme
déambule dans les couloirs de ce gigantesque hôtel, un peu comme dans un
labyrinthe…
La
femme a apparemment son époux également dans l’hôtel…
Le
film est donc un chassé-croisé entre les deux personnages, tour à tour
semblants amoureux l’un de l’autre et finalement se repoussant…
Les
vues du jardin de l’hôtel, les pièces, les chambres de ce lieu insolite sont
une partie intégrante du film et y jouent un rôle prépondérant, faisant
naviguer le spectateur entre rêve et réalité…
Mon
avis :
Nés
en 1922 tous les deux, Alain Resnais et Alain Robbe Grillet allaient
révolutionner le cinéma (rien que ça !) en 1961 avec ce film monumental qu’est
« L’année dernière à Marienbad », c’est bien simple il brise, casse,
concasse tous les codes cinématographiques existants jusqu’alors pour pondre un
film dense, majestueux, hypnotique et d’une marginalité sidérante…
Resnais,
c’est un peu comme s’il était rentré dans l’inconscient du personnage et qu’il
avait réussi à filmer son rêve…
Les
plans s’enchainent de façon virtuose, certaines séquences se répètent mais
filmées à des angles différents (Gus Van Sant n’a rien inventé avec son « Elephant »),
« L’année dernière à Marienbad » est une invitation pour un voyage
sensoriel à mille lieues du cinéma conventionnel et traditionnel…
A la
fois très esthétique et baroque, l’œuvre de Resnais pourra en déconcerter plus
d’un, mais c’est en comptant sur l’ouverture cinéphilique de chacun que l’on
pourra savourer ce film, proche de « Carnival of souls » sorti presque
en même temps et également proche du genre fantastique…
Resnais
a tapé extrêmement fort et pris des risques énormes avec « L’année
dernière à Marienbad », il magnifie la beauté féminine avec Delphine
Seyrig et aborde des thématiques en les explorant finement (le jeu amoureux, la
séduction, l’envie amoureuse, le charme dégagé par la beauté d’une femme, le
refus en lien étroit avec l’insistance…), tout se joue sur le fil du rasoir et
le résultat final est sidérant, nous explorons l’enceinte de l’hôtel et toutes
ses pièces, il y a des jeux de miroirs, des plans séquences filmés du plafond
(quel début !), des chuchotements et une voix off omniprésente, on se
demande un peu où on a atterri et finalement on se laisse charmer et on se
délecte, il faut tout oublier pour voir « L’année dernière à Marienbad »,
ne plus penser à rien et se vider l’esprit…
La
structure narrative est chamboulée pour ne laisser apparaître qu’une succession
d’enchevêtrements de situation, la musique à l’orgue est très importante dans
le film, on pourrait penser qu’elle rend le film plus austère mais en fait elle
apporte une plus grande magie, une forme de mélancolie et fait partie
intégrante de l’intrigue…
Nous
sommes bel et bien dans un NOUVEAU cinéma, dans une NOUVELLE forme artistique
qui influencera bon nombre de réalisateurs (de Bergman à Christopher Nolan en
passant par Kubrick, Wim Wenders ou David Lynch), nous sommes en présence d’un
film hors du temps, hors des normes et hors du classicisme au cinéma…
Pour
achever sa culture cinématographique, tout cinéphile se doit impérativement de
découvrir « L’année dernière à Marienbad », même Dario Argento a « piqué »
l’idée du comptage des pas dans son « Suspiria » pour repérer le
parcours de la sorcière, ce plan apparaît déjà dans « L’année dernière à
Marienbad » avec la scène où Delphine Seyrig est cloitrée dans sa chambre,
tout comme le parallélisme et la symétrie prégnante dans le film que l’on
retrouvera à foison dans « Suspiria »…
Le
noir et blanc de « L’année dernière à Marienbad » est faste et
majestueux, les extérieurs sont magnifiques et les vues nocturnes s’imprègnent
de façon indélébile pour le spectateur…
On
ne peut passer à côté de ce chef d’œuvre, qui ose tout, qui prend des risques
énormes et qui, depuis sa sortie, devint un classique du cinéma…
Incontournable,
dense et fluide en même temps, « L’année dernière à Marienbad »
restera gravé longtemps dans l’imaginaire du septième art et redonne un nouveau
souffle à ce dernier…
Note :
10/10
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire