L’HOMME
SANS PASSE
d’Aki
Kaurismaki
2002
Finlande/France/Allemagne
avec
Kati Outinen, Markku Peltola, Juhani Niemela, Sakari Kuosmanen, Kaija Pakarinen
Film
d’auteur/drame
97
minutes
Grand
prix du Festival de Cannes en 2002
aka
Mies Vailla Menneisyytta
Synopsis :
Ville
d’Helsinki, Finlande, début des années deux- mille…
Après
un voyage de nuit en train, un homme sort de la gare et s’assoie sur un banc ;
soudain il est violemment agressé par trois hommes, dont un skinhead qui lui
assène plusieurs coups de batte en pleine tête, les coups sont si violents que
les voyous le laissent pour mort, après lui avoir dérobé son argent et jeté ses
papiers dans une poubelle…
Peu
de temps après, le jeune homme arrive en sang dans les toilettes de la gare, il
s’écroule et un employé prévient la police ; plus tard, à l’hôpital, la
mort clinique est constatée par le médecin de garde…
Par
un miracle inexpliqué (on suppose une catalepsie), l’homme se relève et quitte
l’hôpital pour se retrouver allongé dans un terrain vague, à la périphérie de
la ville…
Deux
garçonnets le trouvent et décident de s’occuper de lui, il est recueilli dans
un bidonville peuplé de SDF et ces derniers le nourrissent et lui fournissent
des vêtements ; suite au choc de l’agression, l’homme est devenu
complètement amnésique et ne souvient même plus de son nom…
Irma,
une employée de l’armée du salut, prend empathie pour lui…
Ayant
pu trouver une activité très précaire payée au lance-pierres, l’homme doit se
rendre à la banque pour ouvrir un compte ; c’est alors qu’un gangster
braque la guichetière et l’enferme avec l’homme dans un coffre-fort de la salle
du sous-sol…
La
photo prise par la caméra de surveillance où l’on voit l’homme se retrouve en
première page d’un quotidien, sa femme le reconnaît !
Mon
avis :
Le
propos d’Aki Kaurismaki, illustre cinéaste finlandais bien connu des fans de
films d’auteur, est axé sur les relations humaines et sur l’humanisme dans ce « Homme
sans passé » qui navigue avec brio à contre-courant du cinéma classique
pour se concentrer avant sur un homme, amnésique, recueilli par des sans- logis ;
la mise en scène est sobre, dépouillé, un peu comme les décors que l’on voit et
les frêles gens qui peuplent l’histoire…
Kaurismaki
choisit de ne pas opter pour le misérabilisme mais plutôt sur la richesse des
sentiments humains à défaut d’avoir la richesse financière ; ces séquences
de soupes populaires, de dénuement absolu touchent le spectateur en plein cœur et
les trognes des acteurs sont pour beaucoup dans l’appui du réalisme du film…
Le
postulat semble parti de nulle part (une agression terrible, un homme laissé
pour mort) pour petit à petit se muter en aventure humaniste simple et
authentique, gonflée par la tendresse des personnages (Irma est incarnée avec
justesse par Kati Outinen), proche de films comme « Hasta La Vista »
ou « Bad boy Buddy », « L’homme sans passé » est en outre
un OFNI (objet filmique non identifié) qui ramène à l’essence brute du cinéma…
Pas
d’action, pas de violence (hormis le début) mais une histoire décalée avec ce
que nous avons l’habitude de voir et qui vaudra le grand prix du festival de
Cannes à Kaurismaki en 2002, une œuvre marginale qui se suit au fil de l’eau et
qui pourra décontenancer les spectateurs fermés au cinéma d’auteur (car là on
est en plein dedans !)…
Malgré
un aspect hermétique, « L’homme sans passé » se savoure avec bonheur,
comme venu du froid, un peu comme le cinéma des débuts de Kurosawa était venu
du Japon…
« L’homme
sans passé » est une belle découverte, alliant tendresse et émotion,
authenticité et empathie ; le rebondissement du scénario avec le braquage
aurait pu faire penser à une issue salvatrice mais il n’en est rien, Kaurismaki
prend le parti-pris de l’intelligence et de la justesse et nous ramène face à
la réalité, un peu comme dans les films de Ken Loach…
Parfaitement
interprété, « L’homme sans passé » est un témoignage du film d’auteur
finlandais, atypique dans sa conception et impeccable dans la direction d’acteurs…
Kaurismaki
poussera le jusqu’auboutisme en refusant de se rendre à la cérémonie des Oscars
où le film était nominé comme meilleur film étranger, alors que le conflit dans
le Golfe faisait rage, il écrivit un courrier où il mentionna qu’il refusait de
cautionner la barbarie de l’intervention en Irak…
Cet
humanisme forcené lui rend honneur et le film donne un aspect très intéressant
du cinéma scandinave, très singulier et capiteux, mais néanmoins digne du plus
grand intérêt…
Un
film à découvrir pour les plus ouverts d’entre vous !
Note :
9/10
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire