samedi 17 octobre 2015

Le deuxième souffle de Jean Pierre Melville, 1966

LE DEUXIEME SOUFFLE
de Jean Pierre Melville
France
1966
avec Lino Ventura, Paul Meurisse, Paul Frankeur, Marcel Bozzuffi, Michel Constantin, Raymond Pellegrin, Christine Fabréga, Pierre Zimmer
Policier pessimiste
150 minutes
Adapté du roman de José Giovanni
Edité en DVD chez René Château video
Synopsis :
Paris, Montrouge, Marseille, 1966…
Gustave Minda dit « Gu » se fait la belle avec deux de ses codétenus, l’un d’eux décède pendant l’évasion…
Le commissaire Blot, un homme rugueux et impitoyable doté d’une gouaille sémantique incroyable est chargé de l’affaire, il se rend dans un bar restaurant pour interroger Simone dite « Manouche », une fusillade éclate !
Alban, l’homme de main complice de Gu le fait cacher dans une planque à Montrouge, en banlieue parisienne, il est projeté que Gu quitte la France pour se réfugier en Italie via Marseille…
Paul Ricci et son frère Jo, deux sommités de la pègre locale, cherchent à mettre hors d’état de nuire Gu, ce dernier accepte un dernier deal, un casse en plein air, au sommet d’une montagne où doit transiter un fourgon rempli de platine, un métal précieux, l’exaction tourne au massacre, deux motards sont tués d’une balle en pleine tête et le fourgon détruit…
Pris dans un traquenard, Gu est arrêté par le commissaire Fardiano, il parvient à s’échapper in extremis et souhaite retrouver les frères Ricci afin de leur prouver sa bonne foi et son sens de l’honneur…
Après un bain de sang, Gu est cerné par la police, il a juste eu le temps de neutraliser Fardiano et de lui faire noter ses dires sur un calepin, preuve pouvant le disculper…
Le commissaire Blot jette le calepin en pleine rue, à côté d’une foule de journalistes aux aguets !
Mon avis :
Réalisateur réputé pour sa rigueur voire son intransigeance, Jean Pierre Melville avec ce « Deuxième souffle » franchit une étape supplémentaire dans sa filmographie, le film étant transitoire et préfigurant l’exceptionnel « L’armée des ombres » qu’il tournera deux ans plus tard, toujours avec Lino Ventura…
Tout est ciselé, froid, presque glacial dans « Le deuxième souffle » les personnages aussi bien que les situations qui s’imbriquent les unes dans les autres sans la moindre chaleur ou humanité, les personnages étant formatés de façon réaliste et monolithique, Lino Ventura a très peu de dialogues, tout se confinant à l’essentiel…
D’une noirceur et d’un pessimisme sidérants pour un polar de cette époque, « Le deuxième souffle » met en exergue des thématiques chères à Melville comme la rédemption quasi impossible, l’évasion symbole d’un repenti, le code de l’honneur dans le milieu des gangsters et l’influence implacable de la police entérinée par le commissaire Blot…
José Giovanni qui a conçu la trame scénaristique du film s’est inspiré de personnages ayant réellement existé et qu’il a côtoyé lors de ses séjours en prison, cela accentue par conséquent l’impact de réalisme du métrage…
Comme un étau se resserrant de façon paranoïaque sur Lino Ventura (il sursaute de son lit à chaque fois qu’il entend frapper à sa porte), l’issue funeste s’avère inévitable et la police finit par triompher MAIS le tout dans un climat déprimant, à aucun moment Melville ne ménage le spectateur ou rend sympathique les personnages du banditisme, contrairement à l’empathie pour ceux-ci dans le cinéma policier de l’époque (par exemple Verneuil avec « Le clan des siciliens » qui établit clairement une connivence empathique entre le spectateur et les gangsters)…
Dans « Le deuxième souffle » vous ne verrez personne esquisser le moindre sourire, le film se suit de manière rugueuse et pourtant il fascine, fascination par l’ambiance dégagée et par l’autorité propre à Melville de concevoir ses métrages…
Au niveau technique de la réalisation, on atteint des sommets comme une utilisation récurrente de plans dimensionnels avec des miroirs mais aussi la séquence magnifique du fourgon avec le panorama de la montagne, à noter également une formidable vue de la maison de banlieue située en périphérie urbaine avec une contreplongée de la rue située derrière, un sens graphique sublimé par le noir et blanc du film…
Un film d’exception à tous les niveaux mais à éviter de visionner si vous avez le moral au plus bas tant il est anxiogène, cela reste du très grand cinéma tout de même…

Note : 10/10







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