vendredi 16 février 2018

Coup de torchon de Bertrand Tavernier, 1981


COUP DE TORCHON
de Bertrand Tavernier
1981
France
avec Philippe Noiret, Guy Marchand, Isabelle Huppert, Stéphane Audran, Eddy Mitchell, Jean-Pierre Marielle, Victor Garrivier, François Perrot
Comédie dramatique
124 minutes
Synopsis :
Un village d’Afrique occidentale, en 1938…
Lucien Cordier est le seul et unique policier de la bourgade, il est garant de la sécurité des habitants aussi bien les autochtones que les blancs français présents, nous sommes à l’époque de la colonisation ; Lucien est ridiculisé par tout le monde, il passe pour un poltron et est le souffre- douleur de tous, à commencer par sa femme Huguette, qui l’humilie en permanence et le trompe avec Nono, un simple d’esprit…
Des fois, cela va très loin et Lucien est pris à partie même physiquement, il est chahuté par Le Peron et son assistant….
Lorsque Rose Mercaillou, une jeune femme s’éprend de Lucien et n’arrête pas de lui tourner autour c’est par nymphomanie, elle l’aguiche et veut absolument avoir des rapports sexuels avec lui…
Mais un jour Lucien va péter un plomb, armé d’un revolver, il tue Le Peron et son assistant ; des meurtres s’enchainent mais Lucien se débrouille toujours pour brouiller les pistes et ne jamais être suspecté…
Le frère de Le Peron, sosie de celui abattu par Cordier, débarque dans le village; puis  Huguette Cordier et Nono s’en prennent à Rose, prétextant qu’elle leur a volé un magot d’argent…
Lucien se délecte de voir la zizanie qu’il a mis et peut ainsi assouvir ses pulsions de vengeance face à tous ceux qui l’ont fait souffrir précédemment…
Méthodique et moins bête qu’il n’en avait l’air, il élabore des techniques sans failles et les autorités n’y voient que du feu…
Mon avis :
« Coup de torchon » est un film immense, d’abord par l’atypisme de son histoire (très peu de films français ont parlé de la colonisation avec l’Afrique) mais aussi par le jeu savoureux de tous ces acteurs, car là on se régale ! Chacun est à sa place et Noiret opère un jeu de massacre, il vire à trois cent soixante degrés de son personnage initial, un poltron souffre-douleur qui va se muter en tueur en séries, ça barde et Tavernier y va très fort dans l’érotisme avec Isabelle Huppert (on ne peut s’empêcher de penser à son rôle dans « Les valseuses » sorti sept années auparavant), la belle ne recule devant rien et dévoile son corps superbe en intégralité lors de séquences hautement érogènes ; on se demande bien ce qu’elle trouve à Lucien Cordier/Noiret, peut être un rapport paternaliste inconscient, quoiqu’il en soit « Coup de torchon » est un film magistral, que ce soit pour son intelligence de traitement que pour la maitrise cinématographique dont fait preuve Bertrand Tavernier, c’est du même niveau que « Buffet froid » et on peut faire une corrélation non fortuite entre ces deux films, il y a de l’absurde et une rigueur de mise en scène par une déstabilisation du spectateur au niveau des codes cinématographiques, Tavernier a mis la barre vraiment très haut et le résultat au visionnage est sidérant ; il n’y a pas de compétition entre les acteurs ils sont tous à leur place et exécutent ce que Tavernier leur demande, mais c’est filmé, c’est tourné, c’est coordonné de façon proche de la magie ; cette synergie dans le déroulement de l’histoire, dans l’accomplissement des actes de Cordier/Noiret donne un plaisir fou, aussi bien au personnage du film qu’au spectateur, on jubile littéralement de voir la vengeance opérée par Noiret, qui s’en était pris plein la figure, mais qui, là, va remettre les pendules à l’heure, et le côté très orignal et atypique des séquences renforce encore plus l’insolite et l’aspect jubilatoire ; très peu de films français sont parvenus à atteindre cette sensation donnée au spectateur…
On sort du visionnage de « Coup de torchon » pantois mais heureux, on assiste pendant près de deux heures à un spectacle incroyable, on rit souvent (de la bêtise des personnages) et on rêve (l’action se situe juste avant la guerre dans un pays d’Afrique, cadre très singulier), Tavernier opte pour le réalisme des scènes et appelle un chat un chat (les dialogues sont élaborés de main de maitre et sont hyper recherchés), en tout cas « Coup de torchon » est un chef d’œuvre délectable et un numéro d’interprétation remarquable….
C’est l’un des films qui a eu le plus de nominations aux Césars sans en obtenir, ce qui, somme toute, peut paraître inconcevable !
Franchement lorsqu’on voit des films de cette trempe, c’est là qu’on reprend confiance dans le cinéma français, et maintenant, trente-sept ans après, il est difficile de trouver des films du niveau de « Coup de torchon » dans le panorama du cinéma hexagonal, donc il est indispensable de revoir tous ces monuments qui rendaient honneur au cinéma tricolore ;  « Coup de torchon » est un chef d’œuvre absolu qui possède une grâce et une énergie phénoménales, le plaisir est au rendez-vous avec ce film qui est devenu depuis un classique…
Noiret/Huppert/Audran/Mitchell/Marchand/Marielle sont époustouflants et lorsqu’ils gravitent sous la caméra de Bertrand Tavernier, ça donne un cocktail savoureux qu’on ne se lasse jamais de revoir…
Un pur régal !
Note : 9.5/10










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